Grundfos est un fournisseur de solutions de pompage bien connu dans le domaine du traitement de l’eau, une activité clairement stratégique pour ce groupe international. Via son expérience et son savoir-faire, il répond aux applications des industriels via des solutions toujours plus communicantes. Spyridon Kranias, responsable applications traitement de l’eau chez Grundfos, nous apporte son analyse du marché et nous explique comment le groupe allie produits, digital et services.
Qui êtes-vous ?
Spyridon Kranias : Grundfos est une société créée au Danemark en 1945, avec l’invention et de la commercialisation d’une pompe à eau imaginée par l’ingénieur Poul Due Jensen. Aujourd’hui, Grundfos, dont le siège se situe à Bjerringbro, au Danemark, est un groupe international qui regroupe 19 600 collaborateurs répartis dans quatre-vingt-deux entités et cinquante-six pays. Nous sommes présents en France depuis 1972, avec une société de production basée à Longeville-Lès-Saint-Avold (57), et depuis 1988 une société de distribution située à Saint-Quentin-Fallavier (38). Contrairement à d’autres sociétés, Grundfos est détenue en majorité par la Fondation Poul Due Jensen, ce qui nous apporte une certaine indépendance et nous permet d’être financièrement solides.
La gamme d’équipements que nous proposons est relativement large et intègre aussi bien des pompes que des unités de contrôle ou encore des capteurs. Nous disposons pour la production de dix-sept usines implantées sur tous les continents, dont une en France, qui est notamment dédiée à la fabrication des pompes doseuses Smart Digital pour le traitement de l’eau. Nous avons une gamme de produits proposés en standard, mais notre offre ne se limite pas purement et simplement à du matériel : nous sommes toujours à l’écoute du client et proposons des solutions complètes, si besoin sur-mesure et adaptées à chaque application.
Nous sommes présents sur les marchés de solutions de pompage, qui englobent le génie climatique, mais aussi les installations industrielles et, bien entendu, le cycle de l’eau. Et il y a quatre applications phares dans lesquelles Grundfos peut intervenir pour le traitement de l’eau : l’adduction d’eau, le traitement d’eau de process, la réutilisation d’eau, qui prend de plus en plus d’importance depuis quelques années chez les industriels, et enfin le traitement des eaux usées. Le groupe est également engagé dans les Objectifs de Développement Durable, (ODD) notamment au travers de l’ODD 6, et mène des actions concrètes pour faciliter l’accès à une eau potable propre et à l’assainissement pour tous.
Nous travaillons aussi bien avec les utilisateurs finaux, qui profitent de notre savoir-faire pour l’équipement de leurs installations, qu’avec les bureaux d’études, les OEM ou les intégrateurs. Grundfos a également mis en place un réseau de partenaires distributeurs : ils sont omniprésents sur le territoire et bien implantés chez les industriels. Aussi, il ne faut pas oublier que le traitement de l’eau implique quelque part de la chimie, et les industriels qui n’en ont pas toujours la maîtrise déléguent souvent ce volet à des traiteurs d’eau et sociétés d’exploitation : nous collaborons donc également avec eux pour partager notre savoir-faire et nos conseils.
Comment percevez-vous l’état du marché actuel ?
S.K. : L’un des premiers constats que nous pouvons faire aujourd’hui est la constante recherche d’optimisation des procédés. Les industriels ont pour objectif d’augmenter de 20 % en moyenne le rendement de leurs usines, tout en réussissant à gérer au mieux la quantité d’eau et d’éventuels produits chimiques utilisés pour la production. C’est un objectif qui existait auparavant, mais qui est désormais systématique. Un autre constat est que les industriels cherchent à améliorer la qualité de leur eau ainsi que d’autres fluides industriels, à toutes les étapes du cycle de production.
Parallèlement, les industriels parlent, ces dernières années, davantage de moteurs à haut rendement énergétique, qui sont en plein essor depuis une dizaine d’années. Rappelons ici que 10 % de la consommation énergétique mondiale provient du fonctionnement des pompes. Auparavant, nous ne retrouvions qu’essentiellement des pompes à vitesse fixe, et il y a fort à parier qu’elles disparaîtront peu à peu, au profit de systèmes « intelligents » à vitesse variable. C’est le cas avec la gamme Grundfos de pompes centrifuges de surface, équipées de moteurs à très haut rendement IE5 et variation de vitesse intégrée. Les industriels demandent toujours plus d’innovations de la part des fabricants pour être à la pointe de la technologie et améliorer leur process. Et comme une pompe ne fonctionne jamais de façon isolée mais qu’elle s’intègre au sein d’un système, Grundfos dispose dans sa gamme de capteurs qui peuvent être directement intégrés dans les pompes : les équipements doivent désormais tous être communicants et les industriels sont bien conscients de cela. Il s’agit d’une réelle tendance du marché, définissant le concept même de l’Industrie 4.0, et ceux qui ne la suivent pas pourraient un jour cesser d’exister…
Aussi, les industriels cherchent de plus en plus à mettre en place des solutions pour la réutilisation de l’eau. Chaque site a un volume d’eau entrant, qui sera ensuite rejeté sous forme d’effluents, généralement vers la station d’épuration municipale. Si des systèmes sont mis en place sur site et que ce ratio est bien surveillé, les industriels peuvent optimiser l’utilisation de cette ressource en fonction de leurs besoins, de la fourniture d’eau pour les collaborateurs jusqu’à l’eau de lavage d’équipements ou d’installations. La réutilisation des eaux usées évite la surconsommation d’eau et peut être une bonne solution dans certaines régions de France où les ressources en eau sont limitées. Par exemple, le groupe agroalimentaire ARLA utilise depuis 2014 une unité Grundfos de filtration BioBooster sur son site de production à Rødkærsbro (Danemark) pour réutiliser l’eau de process issue de leur ligne de production de mozzarella : cela leur permet d’économiser et éviter le pompage de 750 m3/h d’eau sur la nappe aquifère chaque jour. Les industriels cherchent donc des alternatives pour réaliser moins de prélèvements et optimiser l’utilisation de leur eau. Grundfos, les industriels, mais aussi les grandes entités telles que Véolia ou Suez s’intéressent de près au « Reuse ».
Pour vous, quelles en sont les conséquences directes ?
S.K. : Nous devons rester à l’écoute du client, bien prendre en compte les évolutions du marché et rester proactif. Lorsqu’on parle de traitement de l’eau, il faut bien retenir que chaque industriel aura ses propres besoins. D’une part définie par l’origine de son eau (captage, eau de surface, etc), et d’autre part car la production ne sera pas la même d’un industriel à l’autre. Un site de production pharmaceutique ayant des besoins en eau ultra-pure n’aura par exemple pas les mêmes besoins qu’un site agroalimentaire. Les étapes de traitement ne seront jamais identiques et pourront, ou non, intégrer des étapes telles que : la coagulation, la floculation, la désinfection, la régulation de pH, la filtration, etc. Le process de traitement de l’eau sera donc « à façon » et permettra aux industriels d’avoir une transparence et une plus-value à l’égard de leur propre système de télégestion. En termes de connectivité, nous faisons appel à de grands acteurs du marché, (Microsoft, Siemens et Ericsson) ainsi que le déploiement industriel de réseaux d’appareils IoT. Nous apportons une offre digitale qui permet à l’utilisateur d’obtenir une information précise, via des capteurs intelligents qui utilisent des algorithmes avancés développés par Grundfos.
Grundfos réinvestit chaque année 5 % de ses recettes en R&D, un véritable atout pour la recherche et la conception de nouvelles technologies. Nos lignes de production sont en constante amélioration, et nous mettons de plus en plus le digital et l’automatisation au cœur de la production, apportant plus de précision et de rapidité. Grundfos adopte une certaine homogénéisation internationale de sa production et n’hésite d’ailleurs pas à reproduire les succès technologiques d’un site sur un autre. Nous faisons évoluer nos équipements en leur intégrant de l’intelligence et participons alors de manière concrète à l’industrie 4.0. Rappelons ici que Grundfos a été précurseur dans le domaine : nous avions commencé notamment avec les circulateurs pour le génie climatique équipés de variateurs de fréquence embarqués. Et aujourd’hui, Grundfos fabrique aussi en interne ses propres cartes électroniques pour les intégrer dans ses équipements.
Outre les efforts réalisés en R&D, Grundfos a aussi su aller de l’avant en accompagnant les industriels dans leurs challenges. Connaissant parfaitement les applications dans le traitement de l’eau, nous proposons de vraies prestations de service, au travers de nos techniciens sur le terrain, qui sont au plus proche du client. Nous proposons différentes solutions pour réaliser soit des diagnostics énergétiques sur une installation existante, soit une évaluation par rapport à un relevé d’un parc existant pour ensuite apporter nos conseils. Nous sommes capables de préconiser le changement d’équipements par des modèles plus récents afin d’obtenir des gains supplémentaires via une consommation énergétique moindre et un coût d’exploitation réduit. Et au-delà de réaliser des relevés, nous pouvons aussi mettre en place différents capteurs sur une installation afin de réaliser des mesures spécifiques et déterminer quelles étapes du process peuvent être optimisées. Enfin, Grundfos peut aussi réaliser de la maintenance prédictive en installant des capteurs de façon sélective, aux endroits stratégiques du process. L’utilisateur peut alors être prévenu avant même qu’un dysfonctionnement ne se produise, lui permettant par exemple d’organiser ses équipes en amont et de réduire les temps d’arrêt de production. Nous ne proposons pas seulement du matériel : nous offrons des prestations de service complémentaires afin d’accompagner au mieux nos clients.
Quelles solutions apportez-vous aux industriels ?
S.K. : Grundfos propose une solution globale qui comprend aussi bien les pompes, les drivers, le contrôle commande, les cartes de communications ou les capteurs que l’accompagnement client, les préconisations d’installation, les prestations de service complémentaires, etc. L’eau reste un domaine très stratégique pour Grundfos depuis ses débuts, et nous avons beaucoup de développements en cours, avec des offres digitales qui permettent de réaliser un suivi du process. Nous combinons produit, digital et services. À titre d’exemple, l’une des problématiques rencontrées par les industriels du traitement de l’eau est la réalisation d’un suivi : avec nos pompes doseuses, ils peuvent récupérer à distance des données telles que la consommation ou l’état de fonctionnement. Nous proposons notamment aux industriels la gamme de pompes doseuses Smart Digital, des pompes qui utilisent non pas un moteur asynchrone, mais un moteur pas à pas. Ce dernier permet de contrôler très précisément le déplacement de la membrane pour réaliser des dosages précis de réactifs dans le process. Là aussi, nous avons été précurseurs en équipant un modèle avec un capteur de pression afin de connaître exactement la quantité dosée dans le système : s’il y a des dérives par rapport à la consigne, l’utilisateur est averti, ou mieux, la pompe s’autorégule. L’industriel réduit alors les risques de pertes au niveau de la production. La pompe Smart Digital, avec sa fonctionnalité Flow Control Monitor (FCM), permet de surveiller le dosage en intégrant la mesure de débit. L’installation d’un débitmètre additionnel n’est donc plus nécessaire puisque la pompe est capable de déterminer le débit réel effectif et faire remonter l’information en supervision. Il s’agit là d’une spécificité Grundfos que les industriels apprécient énormément, d’autant plus que la pompe est communicante et peut être intégrée à un réseau Ethernet : le contrôle peut être réalisé à distance. Aujourd’hui, le traitement de l’eau est un défi majeur pour notre société. La forte valeur ajoutée d’une solution réside avant tout dans la compréhension du besoin de l’industriel afin de combiner, comme le fait Grundfos, des équipements technologiquement éprouvés à une intelligence intégrée, et des prestations de services complètes étendues au digital.