À l’heure où le développement durable, et la préservation de l’environnement se trouvent au cœur des préoccupations, comment les usines s’occupent-elles de traiter leurs eaux usées ? Un exemple d’application avec une visite au sein de l’usine Européenne de condiment (Edc) qui traite ses eaux usées et ses déchets, via un filtre performant. L’Edc utilise le filtre Sitère-Beyaert pour pré-filtrer à 60 microns (µm) les eaux usées de l’usine. Descriptif de l’application, fonctionnement, intérêt du fi ltre, avec mm. Konrad Pieniek de Semeca environnement et Luigi Lastella, responsable technique fabrication à l’Edc.
Le Journal des Fluides : Quelques précisions sur la société ?
Luigi Lastella : Sur ce site, nous ne faisons que de la moutarde. Nous appartenons au groupe Kühne et sommes les concurrents directs d’Amora. Notre philosophie consiste à être les leaders en marques de premier prix. Nous comptons environ 120 personnes embauchées.
JDF : Pouvez-vous nous décrire l’application ?
L. Lastella : Il s’agit d’une installation qui traite des eaux usées de toute l’entreprise. Nous travaillons avec un dégrilleur qui ôte une grosse partie de ces déchets. Ce dégrilleur sert de tampon pour que le filtre rotatif effectue sa filtration. Le fluide tamisé par le dégrilleur repart dans une cuve de 15 000 m3. Grâce au filtre de Semeca environnement, nous obtenons une unité d’ultra filtration protégée des particules de plus de 60 microns. Le filtre est utilisé dans le cadre de la protection des filtres à membranes. 70 % des applications du filtre résident dans la protection membranaire. Le filtre fonctionne à basse pression (entre 0.5 et 2 bars).
JDF : comment fonctionne ce filtre ? Quelles sont ses caractéristiques ?
Konrad Pieniek : La caractéristique majeure de ces filtres réside dans leur efficacité à traiter des liquides très chargés et à caractère colmatant. De par leur micro-tamisage de maille de 60 à 120 microns, ils autorisent une large gamme de recyclage et permettent de réaliser de grandes économies d’eau (le filtrat peut être réutilisé, ndlr). Appliqué comme prétraitement, les filtres automatiques s’utilisent dans la protection de buses, de pompes haute pression, de membranes ou encore dans le recyclage de l’eau. Ce micro-tamisage est une technique de séparation de deux phases solide-liquide. Les caractéristiques principales de ces filtres sont les suivantes : compacité pour des débits de filtration importants, adaptation à des produits de charge variable, très grande efficacité pour des effluents très chargés et décolmatage en continu, ne nécessitant pas de contre courant consommateur d’eau. Les filtres ont été conçus sans éléments consommables et leur fonctionnement ne demande pas d’adjuvant. Ils ont également un pouvoir de coupure de quelques dizaines de micromètres et le débit passe de 10 à 100 m3/h, sans rupture de charge.
JDF : Depuis quand date cette installation ? Quels sont vos projets ?
L. Lastella : Notre installation a une dizaine d’années. Nous avons été les premiers en Bourgogne à utiliser les membranes et systèmes de filtres rotatifs pour les eaux usées. Nous souhaitons construire une station d’épuration à part entière.
JDF : comment avez-vous connu ce filtre ?
L. Lastella : Nous ne traitions pas nos eaux usées. Nous avons commencé à chercher des fabricants, installateurs pour voir ce qu’ils pouvaient nous proposer. Nous avons effectué des essais avec des membranes et ce filtre se trouvait précisément installé dessus. C’est, pour nous, ce qu’il y avait de mieux. Suite à cet essai fructueux, nous avons commandé la machine. C’est une installation qui tourne bien et s’adapte à une charge variable de particules.
JDF : Quel est l’intérêt de cette application ?
L. Lastella : Ce filtre présente un avantage sécurité. Au niveau des membranes, nous obtenons une plus grande durée et nous arrivons à de bons résultats. Nous sommes satisfaits de cette installation. Nous filtrons toutes les matières en suspension. Par ailleurs, comme les fluides filtrés varient, nous avons donc choisi la vanne de purge en fonction de l’intensité du moteur, nous asservissons à la charge du produit la purge. Le filtre doit en effet accepter des charges variables avec des rejets parfois liquides, et parfois plus épais.
JDF : Quelles sont les utilisations de ce filtre ? Les domaines d’application ?
K. Pieniek : La protection des équipements, le recyclage, la clarification des fluides, sont autant d’utilisations de ce type de filtre. Il sert ensuite pour des domaines d’application variés : industrie de la papeterie, du bois, agro alimentaire (sucrerie, viticulture, malterie), industrie chimique, pharmaceutique, métallurgie, industrie automobile, textile... Nous avons aussi des applications sur les blanchisseries : on recycle l’eau pour passer dans un échangeur ce qui permet de gagner des calories et d’améliorer le rendement de l’échangeur de 10 %. Par ailleurs, cela évite de rejeter de l’eau chaude dans les nappes phréatiques. Une autre application concerne le lait d’amidon. Nous utilisons la purge pour concentrer les particules situées dans le lait d’amidon. Nous recyclons les eaux du trempage de malt en réutilisant 200 m3 d’une eau à 80 °C au lieu de tout rejeter à l’égout. Nous filtrons la bagasse en sucrerie de canne sur des évaporateurs en Australie. Une application existe aussi au Brésil sur la filtration du lixiviat. Mais le plus de l’application de notre filtre, réside dans la protection membranaire sur des eaux usées d’usine, comme à l’Européenne de condiment.
Petit historique
En 1816, Denis Bornier rachète le moulin de messigny et crée la maison Bornier qui conserve précieusement le savoir-faire et les recettes traditionnelles, transmises de moutardier en moutardier. En 1855, 1858 et 1865, la maison Bornier se voit attribuer les médailles d’Or de la Foire de Dijon et de la Foire de Paris. En 1945, la maison Bornier, qui a désormais une dimension nationale, décide de se lancer à l’exportation. En 1971, l’entreprise, toujours familiale, prend le nom d’Européenne de condiments (EdC) et s’installe au sud de Dijon, à Couchey, à quelques kilomètres du prestigieux vignoble de Gevrey Chambertin. C’est le début d’une forte période de croissance qui verra, en 30 ans, les volumes de l’entreprise passer de 2 500 tonnes à plus de 25 000 tonnes. En 1986, EdC, afin d’accélérer son développement, notamment à l’international, s’associe à l’entreprise familiale allemande Kühne qui prend une participation dans le capital. En 1992, EdC absorbe l’activité moutarde de la société Ducros, basée à Beaune. Enfin, en 2001, le groupe Kühne prend une participation majoritaire dans Européenne de condiments pour mener à bien le développement futur.
Moutarde, mode d'emploi
La moutarde de Dijon est élaborée à partir d’un mélange de graine de moutarde et de verjus. Le verjus est constitué d’eau, de vinaigre et de sel. La graine de moutarde est alors gorgée de verjus. Elle est ensuite broyée et finement tamisée afin de séparer la moutarde du son. le piquant, qui se trouve dans la graine, est libéré lors du broyage de la graine dans le verjus. On obtient ce qu’on appelle l’allyl senevol, c’est-à-dire le piquant. L’allyl senevol, étant particulièrement volatil, il est vivement conseillé de conserver la moutarde au frais afin de conserver son piquant.
Quelques chiffres
10 machines qui font de la moutarde forte 24 h sur 24 ; 120 tonnes de moutarde par jour ; 250 tonnes de stockage ; 70 tonnes de moutarde à l’ancienne.
Le concept du filtre
Le filtre automatique a été conçu sur la base de la génération mécanique d’un champ ultrasonore. Son principe est un décolmatage en continu par la mise en suspension des particules à filtrer grâce à la variation de différentes pressions de part et d’autre d’une crépine filtrante. De construction tout inox 316 litres, les filtres sont constitués de deux pièces cylindriques concentriques, qui assurent la filtration et le décolmatage en continu : une pièce cylindrique extérieure tournante (1 500 ou 3 000tr/min) constituée d’une tôle percée au laser à 60 microns assurant la filtration. Une contre-pièce intérieure fixe constituée de barreaux verticaux assurant le décolmatage. La variation de la section entre les deux crépines provoque une variation de la vitesse du liquide, nous avons tantôt une chute de pression, tantôt une hausse de pression à grande fréquence qui assure un décolmatage en continu. L’alimentation sous pression est extérieure à la pièce filtrante. Le filtrat est récupéré en continu au centre de la contre pièce. La purge est prélevée périodiquement à l’extérieur de la pièce filtrante.
Propos recueillis par chloé chamouton.
Article paru dans le journal des fluides n°37, Mars-Avril 2010